Rêver, essayer, se lancer, autant de verbes que notre génération conjugue à l’impératif et au présent avec talent et parfois une bonne dose d’inconscience (heureusement).
Le collaboratif, la co-construction sont les nouveaux mots dont nous faisons nos étendards, car tout en ayant conscience de ne pas inventer le processus collectif from scratch nous nous l’approprions pour en faire une force, décuplée par les outils et la culture numérique.
Cette culture numérique, Karine Goldberg s'en est notamment imprégnée pendant 3 ans en défendant et valorisant des projets au sein de La Fonderie, bras armé du numérique en Ile-de-France. Quand elle se présente, elle dit que son maître mot c'est l'adaptation. Après des études de philo, un passage dans l'éduc pop, elle atterrit dans la com, puis le numérique, façonné par les rencontres. Un jour elle a décidé de donner sa place à la petite voix qui trottait dans sa tête et se cognait aux parois. Grâce à un bilan de compétences, elle a identifié ce qu’elle cherchait : quitter son écran, gagner son indépendance, être plus créative. Pour répondre à cette équation, elle est devenue céramiste. Pendant six mois, elle a rejoint l’atelier du maître Augusto Tozzola pour préparer son CAP. Tourner la terre, 7h par jour, la travailler, apprendre à la connaître, la soumettre au feu pour qu’en sortent les objets de son imaginations : tasses, vases, amphores, décors utiles…
Lorsque Pantin lance un appel à projets pour quatre locaux destinés aux artisans d’art dans le futur nouveau quartier du canal, Karine fonce, et voit entre les lignes du formulaire de réponse l’opportunité de faire fusionner ses deux univers. Elle imagine alors transformer 40m2 en atelier partagé, un co-working pour céramistes où l’on viendrait créer, partager, apprendre. Bâton de pèlerine et power-point de 50 slides en poche pour démontrer la viabilité de son projet, mais aussi sa démarche innovante et l’explication par a+b que cela répond aux nouveaux modes de travail comme aux attentes des habitants du nouveau Pantin, Karine est depuis par monts et par vaux, quittant l’atelier pour convaincre élus, bailleurs, investisseurs. La tête bien faite et sur les épaules, elle s’est mise au business plan, aux négociations et aux plan d’architecte, éprouvant au quotidien combien il faut croire en soi et son projet pour emporter l’adhésion, transformant son réseau de geeks en soutiens d’un nouveau genre, adaptant son énergie créative aux réalités entrepreneuriales.
Un bel exemple de notre génération créative et innovante qui puise ses forces dans les savoir-faire et l'excellence française tout en se les appropriant et en démontrant sa valeur
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suivre le travail de Karine : http://karinegoldbergceramique.tumblr.com/
Pour tout vous dire, il ne s'agissait pas précisément d'un café mais plutôt d'un apéro. D'une "party" même. Et oui, on est chic ou on ne l'est pas.
Un lundi soir, nous poussons timidement la lourde porte du Théâtre du Palais Royal pour participer à une Gladparty. S'y retrouvent autour de Gladys, jeune blogueuse théâtre, des professionnels du théâtre, des blogueurs, des artistes, des spectateurs passionnés. Les mots d'ordres sont simples : convivialité, rencontre, amour du théâtre. Une soirée sans arrière pensée.
Alors avec une coupe en main, on a rencontré du beau monde.
On vous épargne notre carnet de bal pour aller droit au but : ce soir là nous avons rencontré
Hermine et Gabriel. "Bonjour, vous êtes blogueuses? ", l'approche est directe, on aime ça.
S'en suit le récit d'une belle aventure entrepreneuriale comme on les aime : la première est une ex-journaliste chez BFM TV, le second est issu des circuits de la finance et de l'immobilier. Tous deux avaient besoin de se lever le matin en donnant plus de sens à leur métier. Ils se sont trouvés autour de La Box culturelle.
L'idée : vous accompagner dans vos sorties culturelles en disposant chaque mois dans votre boite aux lettres des propositions dénichées par Hermine et Gabriel pour agrémenter vos soirs et week-ends. De la musique, de la lecture, des places de théâtre ou de concert, des soirées insolites... un doux mélange pour vous faire voyager pendant un mois.
Ils ont remonté leurs manches, jonglent entre mille trucs à faire, bondissent de plan de trésorerie en levée de fond et courent de mise en place de partenariats en définition de charte graphique.
Dans un secteur culturel essentiellement constitué d'associations et d'établissements publics, ils conjuguent brillamment la culture avec les aléas du business et jouent le jeu en
parlant EBE, fond de roulement, marge, $€£#%...
Il ne nous aura pas fallu longtemps pour décider de mettre notre grain de sel dans leur box. Nous partageons une même envie : celle de faire découvrir des artistes talentueux dont on
parle moins en chuchotant leur nom à votre oreille, en créant avec eux et avec vous les conditions de rencontres insolites qui autorisent la surprise. Dans le brouhaha de
l'offre parisienne pléthorique, proposer une voie. Pas mieux qu'une autre mais personnelle et donc sensible. Sortir, voir, écouter, lire. Essayer. Créer, doucement, les conditions de la rencontre
et de l'échange autour de l’œuvre et du travail des artistes. Permettre à l'art partout, de votre smartphone à votre boîte aux lettres.
Avec Hermine, Gabriel et un grand nombre de blogueurs ou d'entrepreneurs de la culture, nous partageons la conviction qu'en continuant de semer nos petites miettes de beau, de mots, d'art-à-part, nous contribuons à rendre chacun plus humain et à mettre des couleurs dans ce monde qui est le nôtre.
Alors voilà, pour fêter l'arrivée du printemps on a accepté de mettre un peu le bazaar dans la box culturelle. Comme les abonnés, on ira voir l'expo Boulez à la Philarmonie de Paris, on prendra des places à l'Archipel, on glissera dans notre ordinateur les chansons de Joseph d'Anvers et de Mellino, on regardera tomber la pluie en matant "Zaytoun" ou "Eden à l'Ouest". Et à la fin du mois, l'univers d'Hermine et Gabriel sera venu élargir le nôtre.
Plus d'infos sur
www.laboxculturelle.com
Rémi, on a du se croiser dans les couloirs de Sciences Po, mais sans se voir ni se connaître.
Par amis communs, j'ai entendu parler de cet ancien élève devenu magicien. Par curiosité je suis allée voir son spectacle, "Le Script", et ça m'a plu. On en avait d'ailleurs fait un article sur Rue89 en 2011.
Et puis on s'est vraiment rencontrés, par hasard, au Creative Morning où Jérôme Ruskin d'Usbek & Rica était invité (mais c'est un autre sujet qu'on abordera bientôt).
J'ai trouvé ça original, un magicien dans cet antre de créatifs version pubeux. Avec son costume sombre, il était presque le plus habillé de l'assistance. J'ai trouvé ça bizarre pour un intermittent (il n'y a pas plus encline aux clichés sur les intermittents qu'une intermittente...). Quand il m'a expliqué être aussi consultant en innovation pour des entreprises, alors là je l'ai carrément invité à prendre un café.
Outre le mauvais caractère légendaire des serveurs du Wepler, il a beaucoup été question d'enfance et de belles histoires.
Quand on a sept ans, au fin fond des Pyrénées Orientales, pour découvrir la magie et les secrets de la scène, il faut attendre les passages des petits cirques itinérants qui sillonnent le territoire. Pour accéder aux coulisses qui l'attirent, Rémi se fait embaucher comme petite main à chaque fois qu'un nouveau chapiteau débarque.
Jeune adolescent, il aime d'instinct ce qui sépare le visible, la scène, et le joyeux foutoir qui peut régner derrière. Un jour, dans un de ces cirques, il rencontre un magicien qui lui souffle quelques titres de livres. Et hop, Rémi se retrouve dans la rue pour tester ses premiers tours. Déjà il ose essayer ! Déjà, il n'est pas attiré par les cartes et la magie de salon mais par la scène qu'il recrée avec une planche, l'été dans les Landes.
Rémi est bon élève, passe son bac, et choisi une prépa Sciences Po pour "monter à Paris", presque un prétexte pour se rapprocher du milieu des magiciens. Entré rue St Guillaume, il part en troisième année à Boston. Là, il découvre le mentalisme, une technique qui n'était pas du tout développée en France. De scènes ouvertes en spectacles sur le campus, il s'initie à cette technique.
De retour en France, diplômé, il fait un choix particulier : travailler comme consultant en innovation tout en développant sa carrière de magicien.
Loin de la figure de l'artiste maudit, enfermé dans sa bulle, loin des codes sociaux, Rémi incarne donc une alternative possible, bien ancrée dans les enjeux de notre génération de slasheurs et de notre société clignotante. Ce que je trouve le plus réjouissant, c'est qu'il ait trouvé Son alternative, son équilibre. A l'écouter, c'est grâce à ces deux regards sur le monde, aux différentes rencontres qu'il fait sous ses deux casquettes qu'il nourrit son travail de magicien. Cette respiration lui permet de ne pas être en vase clos, de ne pas se mettre la pression, de ne jamais s'ennuyer.
Mais derrière son costume (trois pièces), j'ai voulu savoir ce qui anime un magicien. On a compris que Rémi aimait bien sortir des sentiers battus. Alors il a voulu emmener la magie au théâtre. Pour que le poids du lieu le force à dépasser le coup de bluff, l'enchaînement de numéros. Pour travailler ses tours, il a eu besoin d'un personnage. Naturellement, il a instillé les codes du théâtre dans sa magie, a usé de la poésie. Alors que le nouveau cirque mène cette entreprise de réenchantement depuis quelques décennies, la magie s'y met doucement et Rémi y participe.
En filigrane de son récit, on perçoit la solitude du magicien, technicien qui travaille sans relâche ses tours, cherche de nouveaux trucs et surtout cultive le secret comme un inventeur protège son brevet. Pour emmener son spectateur vers le mystérieux, l'impalpable qui fascine, Rémi va doubler son travail de magicien de celui de l'acteur. Il va ajouter aux trucages les ingrédients d'un vrai voyage : l'histoire, la poésie, la beauté.
Du public français, réputé comme le plus difficile en digne descendant de Descartes, Rémi a appris les composantes d'une bonne histoire : l'implication du public, l'humilité nécessaire du magicien sur scène qui ne doit pas imposer sa position de "sachant", l'humour, la poésie. Avec tout ça, on souhaite donc qu'il continue à inventer des tours et des personnages qui nous fassent voyager, pour faire de la magie une discipline à part entière, créative et réactive aux innombrables possibilités de notre siècle.
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Rémi joue encore Le Script pour quelques dates au Théâtre Trévise :
Les mercredi (20h) et samedi (17h) jusqu'au 14 mars 2015 au 14 rue de Trévise 75009 Paris
Un café avec...
Nous les avons voulu les plus libres possibles ces rencontres. Un certain jour, à un certain endroit, donner rendez-vous à un inconnu par l'entremise de quelqu'un, "tu verras... je ne peux pas t'en dire plus... c'est quelqu'un de particulier...'", guetter son arrivée en essayant de se souvenir du signe distinctif qu'il nous avait donné, commander un café, puis deux et laisser l'odeur réconfortante du brevage dissiper les premiers instants de gêne. Enfin, tendre l'oreille et suivre le fil du récit : un artiste, une histoire, un désir de quelque chose, les mots pour le dire et le mouvement pour le danser...
Nous les avons voulu les plus libres possibles et quand j'ai vu arriver Miki je crois que je ne m'attendais pas à me laisser à ce point surprendre par la simplicité d'une rencontre, d'un moment partagé gratuitement où ce qui compte est seulement de tenter de s'appocher le plus près possible d'un mystère.
Miki Tajima est un mystère et je crois qu'une bonne demi-douzaine de cafés ne permettront jamais d'en saisir la portée. Né d'une mère hongroise et d'un père japonais, il se lance à corps perdu dans la musique, il sera un grand pianiste... non, disons plutôt peintre puisque c'est aux Beaux-Arts qu'il est sur le point de rentrer... avant de renoncer au profit du Kendo, de la prestidigitation, de la danse... Les talents ne manquent pas et l'on imagine sans mal ce jeune homme de vingt ans jongler avec l'un puis avec l'autre, valse hésitatante d'un artiste complet qui ne voudrait se priver d'aucune forme pour exprimer ce qui au fond de lui tremble, comme une parole sans les mots qui aurait besoin de magie, de musique et de couleurs pour se dire.